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Déclaration des contrats d’assurance-vie souscrits à l’étranger, par Frédéric Douet


Afin de lutter contre la fraude fiscale, les personnes physiques domiciliées fiscalement en France ont l’obligation de porter à la connaissance des services fiscaux français les contrats de capitalisation et les placements de même nature, notamment les contrats d’assurance-vie, qu’elles ont souscrits auprès d’organismes établis hors de France (CGI, art. 1649 AA). Les personnes concernées doivent joindre à leur déclaration de revenus un formulaire (n° 3916-3916 bis), formulaire sur lequel doivent être mentionnés les références des contrats ou placements concernés, la date d’effet et la durée de ces contrats ou placements, les opérations de remboursement et de versement des primes effectuées au cours de l’année précédente et, le cas échéant, la valeur de rachat ou le montant du capital garanti, y compris sous forme de rente, au 1er janvier de l’année de la déclaration.


En cas de défaut de déclaration :


- tout d’abord, le contrevenant est passible d’une amende de 1 500 € par contrat non déclaré, montant porté à 10 000 € par contrat non déclaré lorsque l’obligation déclarative concerne un État ou territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires (CGI, art. 1766). Cependant, en cas de rectification du fait des sommes figurant ou ayant figuré sur un ou plusieurs contrats de capitalisation ou placement de même nature qui auraient dû être déclarés, une majoration de 80 % s’applique aux droits dus (CGI, art. 1729-0 A, I, b). Le montant de cette majoration ne peut être inférieure à l’amande de 1 500 € ou de 10 000 € ;


- ensuite, les versements faits à l’étranger ou en provenance de l’étranger par l’intermédiaire de contrats non déclarés constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables ;


- enfin, au lieu de s’exercer jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, le droit de reprise des services fiscaux s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.


S’agissant de cette dernière question, la cour administrative d’appel de Nantes a rendu le 23 décembre 2022 un arrêt qui mérite d’être souligné (n° 20NT03961). Dans cette affaire, une contribuable a souscrit en 2008 un contrat d’assurance-vie auprès d’une société luxembourgeoise et y a placé la somme de 5 200 000 €. Au titre de l’année 2008, l’intéressée a déclaré ce contrat selon les modalités prévues par le code général des impôts, mais elle s’est abstenue de le faire au titre des années suivantes. Toutefois, la contribuable a d’une part, mentionné la référence du contrat dans ses déclarations relatives à l’impôt sur la fortune de 2009 à 2015 en y inscrivant la valeur nette tenant compte des rachats partiels effectués et, d’autre part, a déclaré en 2009, 2010 et 2012 les revenus du contrat sur ses déclarations de revenu. Selon la cour administrative d’appel de Nantes, il s’agissait d’indices suffisants permettant d’ouvrir une enquête sur le contrat d’assurance-vie détenu par la contribuable au Luxembourg. Même si celle-ci n’a pas respecté l’ensemble de ses obligations déclaratives, les juges nantais ont considéré que les services fiscaux ne pouvaient pas, sans méconnaître le principe de libre circulation des capitaux (traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, art. 63), appliquer le délai de reprise exceptionnel de dix ans. Reste à savoir si cette solution relative aux contrats d’assurance-vie souscrits au sein de l’Union européenne sera confirmée, notamment par le Conseil d’État.


Frédéric DOUET, professeur à l’Université Rouen-Normandie (@Fiscalitor)


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