Cette évolution jurisprudentielle permet d’éloigner le risque de responsabilité d’un vendeur vis-à-vis de son acquéreur dans l’hypothèse fréquente où il aurait seulement fait installer un élément d’équipement obsolète (chaudière par exemple) ou fait ajouter un nouvel élément d’équipement (climatisation, pompe à chaleur par exemple).
Situation antérieure : arrêt du 15 juin 2017
Par un arrêt du 15 juin 2017 la cour de cassation avait opéré un précédent revirement de jurisprudence en considérant « que les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination » (3e Civ., 15 juin 2017, pourvoi n°16-19.640).
Nouveau revirement : retour au régime antérieur au 15 juin 2017
Dans son arrêt du 21 mars 2024 n°22-18.964, la troisième Chambre civile de la Cour de Cassation rétablit sa jurisprudence traditionnelle, antérieure à juin 2017 et énonce que « si les éléments d’équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l’assurance obligatoire des constructions. »
En l’espèce il était question de l’installation d’un insert dans la cheminée d’une maison. Un incendie étant survenu dans le conduit de cheminée, la compagnie d’assurance assurant les biens a assigné l’assurance de la société ayant installé l’insert aux fins d’indemnisation.
La Cour dans son arrêt fait le constat de l’échec de l’objectif poursuivi en 2017. En effet elle relève que « les installateurs d’éléments d’équipements susceptibles de relever de la garantie décennale ne souscrivent pas plus qu’auparavant à l’assurance obligatoire des constructeurs. La jurisprudence initiée en 2017 ne s’est donc pas traduite par une protection accrue des maîtres de l’ouvrage ou une meilleure indemnisation que celle dont ils pouvaient déjà bénéficier au titre d’autres garanties. »
Il convient donc, désormais, de distinguer deux situations :
. Les éléments d’équipement considéré comme un ouvrage : l’élément d’équipement est immobilisé à la suite de travaux de construction et non de pose. Dans cette hypothèse l’élément d’équipement est considéré comme un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil.
. Les éléments d’équipement dissociables du bâtiment existant : l’élément d’équipement a seulement été posé par l’entreprise, il peut être retiré sans détérioration du bâtiment existant.
Dans ce dernier cas, seule la responsabilité contractuelle de droit commun pourra être invoquée contre l’installateur.
En conséquence, il est important pour le vendeur, de fournir le contrat conclu avec l’installateur. Cela permettra d’exclure le jeu de la garantie décennale et de prouver qu’il n’a pas réalisé lui-même les travaux de pose d’élément d’équipement. A défaut de preuve de l’installation par un tiers, le vendeur est présumé avoir réalisé les travaux lui-même et est assimilé à un vendeur de mauvaise foi par la Cour de cassation (Cass., 3e civ. 15 février 2024, n°22-20.363).
S’agissant de la responsabilité de droit commun applicable, une distinction est faite entre un contrat de vente et un contrat d’entreprise passé avec l’installateur. Ce dernier suppose la réalisation d’un travail spécifique, à défaut cela relève du contrat de vente.
Quel que soit le contrat retenu et le régime de responsabilité applicable, l’acquéreur pourra mettre en jeu la responsabilité de l’installateur du fait du transfert des actions attachées à l’immeuble en tant qu’accessoires.
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